SEJOUR ANNUEL. 2ème JOUR : BANYULS-CHEMIN DE WALTER BENJAMIN
Mardi matin : après un excellent petit déjeuner, nous attendons notre pique-nique sur la terrasse de l'hôtel.
Le chat attend aussi son repas... Il guette la tourterelle. Nous aurons plus de chance que lui !
Petit briefing :
Près de 12 km , dans le massif des Albères, avec un bon petit dénivelé. Altitude, au sommet, de 670 mètres.
Après la petite rando à Céret de la veille, nous voilà bien préparés pour crapahuter un peu plus haut.
Alain nous propose "Le sentier de Walter Benjamin", sur les hauteurs de Banyuls. Point de départ: sur une petite place. Et très vite, nous montons dans le vignoble de Banyuls. Quatre absents aujourd'hui pour cause de petits tracas de santé : Anne-Marie, Annie, Marc et Christiane. Ils se reposeront à l'hôtel et nous leur raconterons nos souffrances!
Nous prenons très vite de la hauteur et soleil aidant, nous commençons même à avoir chaud.
Un jeune couple de touristes allemands nous prend en photo au moment où nous empruntons le fameux sentier.
Le bâton de Jeannot précise l'endroit où nous sommes. Petite émotion à l'évocation du périple de ce philosophe juif allemand fuyant les Nazis en 1940. Alors que nous randonnons pour notre plaisir, combien de personnes ont-elles traversé la frontière franco-espagnole, par obligation et la peur au ventre?
Ce sentier est proche du col de Banyuls qui, parce qu'il a été de tout temps un passage realtivement facile entre la France et l'Espagne, est un haut lieu historique : de rudes guerres pour la liberté des peuples l'ont bien souvent emprunté. Chemin aussi de la liberté pour nombre de Français et d'étrangers poursuivis par l'occupant.
Nous allons donc emprunter un chemin qui fut essentiellement un chemin de souffrance, et d'espérance aussi.
Lire à ce sujet : https://sites.google.com/site/cotedevermeille/histoire/banyuls/le-col-de-banyuls-au-travers-des-ages-1
Et pour celui de Walter Benjamin : http://fr.wikipedia.org/wiki/Walter_Benjamin
"26 septembre 1940, Walter Benjamin, alors passé en Espagne, se suicide en absorbant une dose mortelle de morphine." Parce que le gouvernement espagnol lui annonce une reconduite à la frontière... Drôle de destin...
A paru en 2009 : "Le chemin ultime de Walter Benjamin - La mort à Port-Bou" de Jean-Pierre Bonnel (Ed. Cap Béar) dont voici le résumé :
Entre repos, ombrage et bon pas, nous montons encore, mais de façon plus zigzagante, permettant ainsi d'admirer la flore.
Vipérine de Crète (Echium creticum) et chardon élégant,
Vesce à épis (Vicia Cracca) et Hélianthème à goutte.
Potentille velue (Potentilla Hirta)
Deux plantes très présentes :
Laitue vivace (Lactuca Perennis)
et l' Oeillet du Roussillon (Dianthus ruscinonensis)
Alors que nous nous enfonçons dans le maquis, Banyuls là-bas devient tout petit...
Encore quelques marches, hôôô hisse...
Nous voilà entre deux pays. Et not'chef l'illustre bien
Ici, on parle français, enfin: catalan Ici espagnol, enfin : catalan
Mais le mauvais temps semble bien venir des Ibères...
Mais c'est le moment de recueillement au Coll de Rumpiso
Mémorial émouvant avec quelques phrases de Lisa Fittko qui devait amener clandestinement Walter Benjamin en Espagne.
Il est un peu plus de midi. Parce que la vie reprend le dessus..., légères interrogations quant au pique-nique : ici, pas ici, faim, pas encore assez..., chanson bien connue. Les ceusss qui savent et tous les autres braves ont rappelé qu'il valait mieux continuer l'estomac léger car c'est ici que ça se corse. Les Godillots ont décidé d'emprunter un chemin plus difficile: il va falloir y aller.
Certains semblent avoir trouvé le truc! Ou comment un bâton peut devenir remorque!
Ca grimpe, c'est vrai, mais qu'est-ce que c'est beau. Nous sommes dans le bleu du ciel et le rose des cistes. Nous sommes aussi sur la crête avec à gauche la France; à droite l'Espagne. C'est toujours magique une frontière, comme si on changeait de vie ... Et pourtant il n'y a rien de plus artificiel et la terre s'en fout.
Beau contraste , non? Et au loin, je me demande si ce n'est pas la Madeloc, souvenir d'une autre rando!
Et quand on baisse les yeux, c'est pour se perdre dans les tutus de la Paronyque argentée (Paronychia argentea).
Pour ce qui suit, travaillons par thématique :
1.Le plaisir des sens:
Ca y est, l'heure du casse-croûte a sonné et même si on n'est pas encore au sommet, ON A FAIM... et SOIF !
Muscat, porto? On ne se refuse rien dans les alpages! Ni même une certaine sensualité.
hum hum, pour rappel: on clique sur chaque photo pour l'agrandir dans une nouvelle fenêtre. Il y a des mimiques surprenantes!
La réponse ne se fait pas attendre! Le temps fraîchit, le vin réchauffe.
D'autres content fleurette... C'est la Shérardie des champs (Sherardia arvensis).
Puis, puis, l'animalité quand même!
Il y en a aussi qui cherchent la p'tite bête... et qui la trouvent!
C'est pas le genou de Claire; c'est celui de Colette. (Bon, Annie, c'est quoi cette bestiole?)
2.Le sens de la marche :
Et de l'effort donc... Il a bien fallu grimper jusqu'au sommet prévu.
Et à l'instar de révolutionnaires, hisser le drapeau de la victoire!
On se croirait dans un film de l'ancienne URSS, version européenne. Quel dynamisme de la composition..., le drapeau qui claque au vent, les cheveux de Colette en crête hérissée, le ahanement d'Elsa, le V de la Victoire de Mireille et tous ces regards vers des lendemains qui chantent. Magnifique!
Trois figures majeures et féminines! ponctuent cette ascension difficile.
Ah quand même c'est encore beau: ce pas volontaire alors que les éléments se déchaînent.
Marie-Agnès en pèlerin qui arrive à la tour Querroig : notre point culminant, à 670 mètres. Ce ne serait pas une tour de guet mais un vestige d'un château médiéval.
A lire :
"Véritable nid d’aigle, il est entouré de baus (à pics). Sa date de construction est inconnue mais toutefois on peut se demander s’il ne se trouve pas sur l’emplacement de la guarda de Moros qui, à la fin du premier millénaire, était signalé dans les limites territoriales du monastère de Sant Quirk. Sa dénomination de Quer-Roig vient certainement de la teinte rougeâtre (roig) que prennent les rochers schisteux (quer, rocher saillant) au lever du soleil. Ses murs d’enceinte couraient le long du Serrat " (https://sites.google.com/site/cotedevermeille/monuments/cerbere/la-tour-de-querroig)
A droite, Colette qui en botaniste, a fait ses provisions de spécimens là où la soldatesque place ses réserves d'eau... Sacrée Colette. Inimitable!
De là-haut, on se disait qu'en se laissant débouler jusqu'en bas, on arriverait bien vite à Port-Bou, prêt à prendre le train! C'est bien là la gare frontière espagnole.
Le temps, oui, continue de se dégrader. Il va falloir accélérer et la descente va nous faciliter la tâche. Mais bon, ça descend en montant...
Cette séquence nous a semblé la plus sportive... et Carla comme Christine, prises de vertige, ont été bien courageuses!
avec ce boulet dans l'dos!! Sacré sac à dos!
Le tout évidement très beau!
Des genêts en pagaille et ces beaux coussins blancs
C'est l'Armérie du Roussillon (Armeria ruscinonensis).
Et puis, le retour à Banyuls, par un triste temps...
Le repas du soir fut une fête.
Saluant nos deux courageuses, Carla et Christine, gratifiées d'une coupe de champagne!
Demain est un autre jour... On verra ce que la météo nous réservera!
Dominique
Merci à Annie pour quelques identifications de plantes. Ca va toujours mieux à deux!
Je pense particulièrement à ce beau petit muflier à feuilles de pâquerette (Anarrhinum bellidifolium).
Ca, c'est du plaisir à l'état pur! Débusquer une plante, chercher en vain à la déterminer puis, hop, la copine qui vous donne la solution! Merci Annie!
Cet élégant muflier a déjà été photographié à Cubserviès; sans doute le trouve-t-on surtout en moyenne montagne? A suivre car le net n'en parle pas beaucoup.